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 Lettre ouverte de Cédric Klapisch à Nicolas Sarkozy.

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Spielberg-Williams
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Spielberg-Williams


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MessageSujet: Lettre ouverte de Cédric Klapisch à Nicolas Sarkozy.   Lettre ouverte de Cédric Klapisch à Nicolas Sarkozy. Icon_minitimeMar 30 Déc - 13:29

Lettre ouverte de Cédric Klapisch à Nicolas Sarkozy. Cedric_klapisch_reference


Voici la lettre ouverte de Cédric Klapisch ("Un air de famille", "Le péril jeune", "L'auberge espagnole"," Les Poupées Russes", "Paris"...) parue dans le journal le Monde du 6 novembre 2008, et adressée au Président de la République, Nicolas Sarkozy. Je pense qu'elle est intéressante à lire, et soulève le débat sur le cinéma français actuel.

Le 6 novembre 2007

Monsieur Sarkozy,

Vous demandiez récemment à Mme Albanel, ministre de la culture et de la communication, de relancer la démocratisation culturelle en la définissant: "La démocratisation culturelle, c'est veiller à ce que les aides publiques à la création favorisent une offre répondant aux attentes du public." Cette petite phrase anodine cache en fait le drame qui touche depuis quelques années le secteur du cinéma.

Il y a dans la culture, comme dans le rugby, des fondamentaux... Et ce n'est pas seulement à vous que je m'adresse ici, mais à tous ceux qui font aveuglément confiance aux "attentes du public", sans mesurer à quel point la diversité culturelle est ainsi menacée.

Vous vous inquiétez avec justesse d'une maladie française qui s'appelle l'élitisme. C'est vrai, on a souvent reproché au cinéma français d'être snob, prétentieux, intello, "prise de tête", et je dois vous avouer que je l'ai aussi beaucoup pensé.

C'est même assez étrange pour moi de m'être battu pendant des années pour affirmer la nécessité d'un cinéma populaire et de me retrouver à défendre aujourd'hui un cinéma non pas élitiste mais "culturel". J'ai toujours pensé qu'on pouvait faire des films commerciaux en refusant de prendre les spectateurs pour des imbéciles. Je crois à une "troisième voie" qui refuse la sempiternelle opposition: film d'auteur, film commercial.

Un député européen me demandait récemment: "Pourquoi n'y a-t-il pas d'Harry Potter européen?" Est-ce réellement ce que vous attendez tous? Est-ce là votre seul rêve culturel: un film absolument sans auteur et sans saveur dont la seule valeur est d'être un succès? Je comprends que, dans d'autres domaines, vous soyez en attente de résultats industriels. Mais, dans le cinéma, nous préférerions que les personnalités politiques nous incitent à être originaux ou audacieux, plutôt qu'à faire du chiffre.

Aujourd'hui, ce qui nous inquiète, nous, réalisateurs, c'est d'assister à la lente et insidieuse disparition de ce qui pourrait surprendre ou éveiller le public. Il y a de fait un appauvrissement culturel dans notre pays et les élites n'envisagent même plus de travailler à le ralentir. Je m'inscris ici dans la même démarche que Pascale Ferran aux César. Avec la Société des réalisateurs de films (SRF), nous remarquons, comme elle, à quel point la situation se dégrade rapidement, et il devient urgent de réagir.

Si notre métier contient une part de rêve, être "réalisateur", au sens littéral, c'est rendre réels ces rêves. Si nous aidons les spectateurs à fuir la réalité avec nos images, notre but est aussi que ces images les renvoient autrement à la réalité. Le cinéma doit sans doute divertir, mais il doit aussi avertir. Un réalisateur doit plus aider les gens à se "tourner vers" qu'à se "détourner". Il ne doit pas "endormir", mais donner à voir, informer, éveiller la curiosité.

Woody Allen m'a averti des paradoxes du couple. Federico Fellini m'a éclairé sur les mystères de la masculinité, Jane Campion sur les mystères de la féminité. Jean Renoir m'a parlé de ce qui dépasse les classes sociales, Charlie Chaplin de ce qui n'échappera jamais aux classes sociales, Abbas Kiarostami de l'intelligence contenue dans la simplicité, Jean-Luc Godard de la simplicité contenue dans l'intelligence, Martin Scorsese de la beauté de la violence, Alain Resnais de l'horreur de la violence, Pedro Almodovar du fantasme contenu dans le réel, Alfred Hitchcock du réel contenu dans le fantasme...

Tous ces cinéastes m'ont aidé à vivre. Ils m'ont autant diverti qu'averti. Ils m'ont aidé à aborder des problèmes quotidiens sans me donner de leçons. Ils m'ont donné des éléments de réflexion sans que je sache que c'était de la réflexion. Ce "reflet" du monde n'est pas juste un effet de miroir, c'est ce qu'on appelle un regard. Bizarrement, plus ce regard est personnel, plus il sera universel. Moins il sera consensuel et formaté, plus il sera général. La culture a ceci de particulier qu'elle n'est pas conçue a priori pour satisfaire le public, même si au fond elle s'adresse à tous. On pourrait croire qu'avec Internet il y aura toujours plus d'espaces pour plus de films. Non! Paradoxalement, plus on ouvre de fenêtres et plus les portes se ferment. La multiplication des espaces de diffusion accentue la logique de l'Audimat et l'omniprésence des block-busters. Le résultat: un formatage sans précédent des oeuvres.

En matière d'environnement, on sait aujourd'hui que seule l'audace politique peut infléchir les effets pervers de l'industrie. En matière culturelle, il devient indispensable de contrebalancer les effets pervers du marché. Nous ne voulons pas une culture assistée, nous voulons une culture protégée.

Je me souviens de La Voce della Luna, le dernier film de Federico Fellini. Il y mettait en garde l'Italie contre les méfaits de l'acculturation, et notamment le rôle destructeur et abêtissant de la télévision. Aujourd'hui, Fellini est mort, et avec lui Pasolini, Visconti, Antonioni, Rossellini, De Sica et bien d'autres. Et avec eux, quelque chose d'essentiel a disparu en Italie. La cinématographie italienne des années 1940 à 1980 était diversifiée, il y avait aussi bien des grands films populaires que des films difficiles. Ce qui est mort là-bas, ce n'est pas le talent, ce n'est pas une époque... ce qui est mort, c'est la politique qui a déserté le terrain de la culture au profit du divertissement et du populisme les plus mercantiles.

Il est difficile d'inventer une politique qui aide la création, mais le manque d'idées politiques mène à l'acculturation. Se borner à laisser faire le marché en matière de culture, c'est tuer la culture.

Cédric KLAPISCH
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MessageSujet: Lettre Ouverte   Lettre ouverte de Cédric Klapisch à Nicolas Sarkozy. Icon_minitimeVen 9 Jan - 23:31

J'ai exactement le même point de vue...Smile
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MessageSujet: Re: Lettre ouverte de Cédric Klapisch à Nicolas Sarkozy.   Lettre ouverte de Cédric Klapisch à Nicolas Sarkozy. Icon_minitimeSam 10 Jan - 13:28

Aaaah! Enfin une réaction! Je trouve cette lettre très intéressante car elle soulève des problèmes bien réels sur le cinéma actuel...
Car ce qui doit être conservé dans le cinéma c'est sa diversité!
Il y aura toujours besoin de ce qu'on appelle vulgairement des "blockbusters", soit des films à gros budget et grands spectacles, qui peuvent divertir et étonner, sans abrutir, contrairement à un certain nombre d'idées reçues (voir à ce sujet l'ouverture de la liste des grosses productions de 2009 dans "Prochainement").
Il y aura aussi toujours besoin des films d'auteur, qui ont une portée bien plus importante que certains ne le pensent, et qui au delà de messages contestataires ou non, présentent une vision objective, renforçant le portrait d'une société que dresse le cinéma.
Il faudra aussi toujours ce que Klapisch appelle "la 3e voie", un savant mélange des genres, qui propose une alternative.
Et en ce sens, il est vrai que chercher à tout prix à répondre aux attentes du public peut être destructeur. Si on ne retient que ce qui est vendeur, on ne sera plus surpris. On gardera un moule, et les réalisateurs se le passeront, pour rester dans ce que l'on "attend".
Il suffit de regarder le top 3 des films français qui ont attiré les foules en 2008: "Bienvenue chez les Chtis", "Astérix" et "Disco".
Le premier est une comédie légère - il en faut certes - qui a su attirer les foules par sa campagne de promotion hors norme. Car si le bouche à oreille a été efficace, la promotion y a joué pour beaucoup! Dany Boon avait affrété un tgv pour emmener des stars et des journalistes voir le film en avant première à Lille! Si un petit réalisateur avait fait une comédie de qualité semblable sur sa Creuze natale, il n'aurait pas eu les moyens d'affréter ne serait-ce qu'un car et il y a fort à parier que le succès aurait été différent. Je pense que l'effet d'annonce y a été pour beaucoup.
A la deuxième place, on est exactement dans ce que décrit Klapisch. Quand les français veulent faire de l'Hollywoodien... (A noter, pour reprendre la remarque du député européen citée par Klapisch qu'il se trouve qu'Harry Potter est européen! Britannico-américain plus précisémment...)
Quand Hollywood veut reprendre les succès français on a "Les visiteurs en amérique" (un navet d'origine contrôlée). Et dans l'hexagone, le mouvement inverse se traduit par "Astérix" ou les suites navrantes de "Taxi"... Des effets spéciaux à foison, un casting taillé pour faire couler les billets.... et un résultat très très médiocre, complètement formaté.

La lettre est donc juste puisque finalement c'est cet équilibre qu'il faut trouver, et qui semble disparaître de plus en plus...

J'en profite pour formuler ma grande inquiétude à propos du cinéma 3D.
Certes, c'est formidable, fantastique, magique...
Mais il apparait de plus en plus comme la seule solution de relancer la fréquentation des salles. Soit le risque à terme, de faire éclipser le cinéma traditionnel.
Le cinéma 3D, se caractérise, par définition, à rechercher des sensations. En clair: c'est la domination des blockbusters qui semble se profiler, et la disparition partielle d'un certain cinéma.
Je suis peut-être trop pessimiste, mais je pense qu'il y a du vrai...
Pour moi, le 3D doit être développé, il constitue une avancée formidable et il doit se présenter comme un nouveau support. Mais il reste une attraction, qui n'est pas une alternative de remplacement du cinéma traditionnel.
Les producteurs et les sociétés de distribution des films le verront-ils de cet oeil là?
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MessageSujet: Cinéma Français   Lettre ouverte de Cédric Klapisch à Nicolas Sarkozy. Icon_minitimeSam 10 Jan - 23:07

Il est vrai que le cinéma français s'est comme effacé du cinéma International...Ou en tout cas, le BON cinéma français.Je compte ceux qui m'ont vraiment marqué sur les doigts de la Main pale ...
Comme par exemple, "Contre-Enquête", ou "Le Serpent" (magnifique Clovis Cornillac drunken )
Bref, une excellent initiative de la part de Cédric Klapisch...Maintenant, notre cher président a peut être plus important à faire, comme changer les plaques d'immatriculation, ou se bourrer la gueule au prochain G8 albino
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MessageSujet: Re: Lettre ouverte de Cédric Klapisch à Nicolas Sarkozy.   Lettre ouverte de Cédric Klapisch à Nicolas Sarkozy. Icon_minitimeDim 11 Jan - 12:22

Evitons de rentrer dans la caricature et les clichés............

Oui, le cinéma français semble, à part quelques exceptions, ressortir essentiellement à travers les comédies légères...
Remarquons aussi le nombre de réalisateurs français qui choisissent de donner à leur film la "nationalité" américaine comme Michel Gondry avec "Eternal Sunshine of the spotless mind" ou "Soyez sympas rembobinez", Louis Leterrier avec "L'incroyable Hulk" (mais bon ce navet- il en a l'air- n'aurait pu être fait avec un tel budget en France) et même JP Jeunet avec "Un Long dimanche de fiançailles"!!!
Il y a donc bien un problème...

Les réalisateurs français actuels qui me surprennent le plus sont sans conteste Klapisch et Jeunet. Florent Emilio Siri, Olivier Dahan, Laurent Tirard aussi.
Et puis les éternels Agnès Jaoui, Claude Chabrol (même si son dernier "La fille coupée en deux" s'est révélé décevant), Alain Resnais.

"Le serpent" a l'air intéressant, oui...
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MessageSujet: Cinéma Français   Lettre ouverte de Cédric Klapisch à Nicolas Sarkozy. Icon_minitimeJeu 22 Jan - 23:34

Au temps pour moi, il est vrai qu'on est dans un sujet plutôt sérieux..Reprenons
Au sujet de L'Incroyable Hulk, je n'était même pas au courant qu'il était d'un réalisateur français affraid Ce qui ne rassure effectivement pas sur l'avenir du cinéma francophone et on comprend donc mieux l'inquiétude de Cédric Klapisch.Chaque pays a son propre cinéma ou en tout cas l'avait, c'est une grande part de la culture de chacuns.
Evidemment encore une fois,on recherche plus l'argent payée à l'entrée du film que le bonheur ressenti à sa sortie.Et c'est bien dommage...

Mais que faire face à cela?Pourrait-on parler de mondialisation?Si c'est vraiment le cas, le cinéma est loin d'être la seule victime...
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